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7 ambitions pour gagner la bataille de l’emploi et de l’export

12 Mai 2014

cdnum

Anne Lauvergeon commente les principales conclusions du rapport de la commission Innovation 2030 qu’elle a remis à François Hollande en octobre dernier.

Les travaux de la commission que vous présidez s’inscrivent dans une dynamique forte de politique industrielle portée par le gouvernement. Pourquoi avons-nous encore besoin d’un État stratège en France ?

Anne Lauvergeon : L’innovation peut exiger une implication très forte de l’État et des collectivités pour faire aboutir des grands projets, à l’image d’Airbus. Bien souvent, l’innovation surgit de manière imprévisible dans des écosystèmes dynamiques que les pouvoirs publics doivent se contenter d’encourager, même si l’innovation existe aussi sans intervention publique et peut naître de nouvelles valeurs, comme la sobriété.

L’État dispose de nombreux moyens d’action pour créer un environnement favorable aux innovateurs : l’éducation, la R & D publique, les normes, la politique fiscale, les tarifs réglementés, la politique migratoire, un réseau diplomatique qui peut être mobilisé, la commande et les aides publiques, etc. L’État et les collectivités territoriales doivent aligner l’ensemble des outils à leur disposition, avec constance, sur une même stratégie : gagner la bataille de l’emploi et de l’export, sans céder aux effets de mode ou au zapping. Il faut faire des choix dans un monde de plus en plus ouvert, dans lequel chaque territoire, chaque région se concentre sur ses points forts pour atteindre l’excellence.

Nos grands compétiteurs internationaux ont, eux, d’ores et déjà mis en place des stratégies d’investissement ciblées, officielles ou officieuses. Par exemple, la Corée du Sud, le Royaume-Uni ou l’Allemagne ont aujourd’hui des objectifs précis en la matière. L’idée d’un État stratège est bien présente chez nos concurrents.

La commission a sélectionné sept grands enjeux nationaux pour la France, à l’horizon de 2030. Qu’ont-ils en commun ? Quelle place occupera le numérique dans ces travaux ?

A. L. : Les ambitions choisies ont plusieurs points communs. Elles ont la capacité de générer de la croissance, des emplois et des exportations en France. Elles répondent à des évolutions sociétales de fond et trouveront donc un marché. Elles correspondent à des enjeux de souveraineté et elles appartiennent à des domaines dans lesquels la France dispose d’atouts réels : des compétences scientifiques et techniques de premier plan, un tissu entrepreneurial capable de se mobiliser, composé de PME pionnières et de grands groupes, la présence d’une entreprise potentiellement consolidatrice, des ressources importantes, etc. Des innovations majeures, technologiques ou non, sont nécessaires pour répondre à ces ambitions. Enfin, ces dernières concernent de près ou de loin l’action des pouvoirs publics.

Une des ambitions porte sur un enjeu extrêmement important du numérique : la valorisation des données massives (Big Data), où la France présente de nombreux atouts, notamment grâce à l’école française de mathématiques et de statistiques, et grâce à des entreprises leaders sur des sous-segments. Le numérique aura un rôle essentiel à jouer dans l’ensemble des sept ambitions, pour optimiser les systèmes, les modéliser, les commander, gérer de grandes masses de données, mettre en communication les objets, les capteurs, les systèmes, les hommes, etc.

Vos travaux doivent-ils s’articuler avec les orientations définies par Arnaud Montebourg pour la construction d’une « nouvelle France industrielle », qui a débouché sur 34 plans ?

A. L. : L’exercice de la commission s’inscrit en complémentarité du projet de la « nouvelle France industrielle » qui met en œuvre 34 plans définissant des relais de croissance des filières industrielles sur les marchés d’aujourd’hui. La commission veut, quant à elle, susciter, d’ici à dix ans, des leaders industriels français à l’échelle internationale, dans des secteurs précis, en concentrant les moyens sur des axes clés. À noter qu’un des plans de la « nouvelle France industrielle » porte sur le Big Data, et que plusieurs autres s’y rattachent d’assez près : objets connectés, logiciels et systèmes embarqués, réseaux électriques intelligents, usines du futur, supercalculateurs, cloud computing, e-éducation, cybersécurité. Compte tenu du caractère assez transversal du Big Data, ce sont de nombreux secteurs du numérique qui sont en réalité visés.

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